Les corps vils : éthique et politique de l'expérimentation humaine au XVIIIe et XIXe siècles
Texte imprimé
- Auteurs : Chamayou Grégoire (1976-....) ; Lecourt Dominique (1944-....) ; Université Paris Diderot - Paris 7 ;
- Editeurs : [S.l.] [s.n.] ;
- Date d'édition : 2007
- Sujets : Expérimentation humaine en médecine -- Thèses et écrits académiques, Condamnés à mort, Médecine, Éthique médicale, Expérimentation thérapeutique humaine, Législation médicale, France -- Thèses et écrits académiques -- 18e siècle, France
- Autre(s) édition(s) : Les corps vils
- Langue(s) : Français
- Description matérielle : 1 vol. (404 p.), 30 cm
- Pays de publication : France
Notes
Publication autorisée par le jury ; Réf. bibliogr. p.368-398 ; Thèse de doctorat ; Epistémologie, Histoire des Sciences et des Techniques ; Paris 7 ; 2007
Résumé
Les corps vils, ce sont les condamnés à mort, les prostituées, les internés les moribonds, qui ont historiquement servi de matériau expérimental pour la constitution de la science médicale moderne. Cette recherche étudie l'histoire des sujets de l'expérience. A partir de la question de la distribution sociale des risques, elle interroge le lien qui s'est noué, dans une logique de sacrifice des sujets de moindre valeur, entre la pratique scientifique moderne et l'avilissement de certaines vies. Il s'agit d'associer une histoire épistémologique (les dispositifs expérimentaux et de leurs modes de problématisation éthiques à une histoire technopolitique des sciences expérimentales considérées en tant que dispositifs d'acquisition. Dans cette histoire du pouvoir d'expérimenter, les corps vils interviennent d'abord comme doublures du souverain, par délégation de son pouvoir de vie et de mort. L'inoculation variolique, prenant pour objet toute la population, modifie ce schéma. L'émergence de la clinique se fonde ensuite sur un « contrat d'assistance » entre les classes, le soin des pauvres permettant l'extraction d'une plus value cognitive transférable. La médecine expérimentale, fondant l'essai thérapeutique sur l'expérimentation physiologique se justifie par sa scientificité. Mais le développement de la pathologie expérimentale produit une crise déontologique qui aboutit à placer le consentement au centre d'un dispositif d'acquisition pensé sur le modèle contractuel de la relation de travail. La tendance à l'expérimentalisation du monde pose la question du rapport de la médecine à ses « externalités ». C'est le problème de la conscience sociale et politique des médecins au sein de la société industrielle et lors des entreprises coloniales ; The vile bodies are prisoners condemned to death, prostitutes, hospital inmates, terminally ills, who historically served as experimental material in the constitution of the modem medical science. This study is about the history of the subjects of the experiments. From the question of the social distribution of risks, we question the link vvhich has been established, in a logic of sacrifice regarding the subjects of Iesser value, between the modem scientific practice and the degradation of certain lives. This work associates an epistemological history of the experimental practice and of its ethical modes of problematisation with a technopolitical history ofthe experimental sciences considered as devices of acquisition. In this history of the power to experiment, the vile bodies intervene at first as 'stand-in' for the sovereign, by delegation of its power of life and death. The variolic inoculation, taking the whole population for object, changes this configuration. The emergence of the clinic develops a 'contract of assistance' between the classes, the care of the poor allowing the extraction of a transferable cognitive surplus value. The experimental medicine, basing the therapeutic trial on the physiological experiment bases itself on its scientificity. But the development oft he experimental pathology induces an ethical crisis vvhich puts the notion of consent at the core of an acquisition device thought on the contractual model of the work relation. The tendency to the experimentalizafion of the world asks the question of the relationship between medicine and its 'externalities'. The problem is then the social and political consciousness of the physicians within the industrial society and L during the colonial expansion.