Masque zoomorphe
Objet
- Type d'objet : Objet
- Nom vernaculaire : ejumba
- Géographie : Afrique – Afrique occidentale – Sénégal – Casamance
- Culture : Afrique – Diola
- Date : 18e siècle (?)
- Matériaux et techniques : Vannerie d'écorce, cornes de boeuf, coquillages, graines d'abrus, cuir
- Dimensions et poids : 46 x 38.5 x 28 cm, 362g
- Précédente collection : Musée de l'Homme (Afrique) ; Ancienne collection : Cabinet d’Histoire naturelle de Versailles ;
- Exposé : Oui
- Numéro d'inventaire : 71.1934.33.38 D
Description
Masque heaume en écorce tressée en larges damiers ; forme allongée avec arête centrale. Sommet surmonté de 2 cornes de boeuf, 2 trous circulaires pour les yeux près de l'arête centrale. Base bordée de rotin. Traces d'un enduit noir qui devait autrefois le recouvrir. Un papier portant des caractères arabes (amulette) était collé sur cet enduit, sous les cornes.
Usage
Ce masque est constitué d’une sorte de heaume de fines bandes d’écorce tressées surmonté de cornes de boviné. Deux orifices circulaires permettaient au porteur du masque de voir. A la base des cornes des restes de cire d’abeille et de quelques graines rouge d’Abrus indiquent que l’objet a perdu ses ornements colorés. Au niveau du front, des fragments de cuir comportant une inscription en arabe, relique d’un phylactère prophylactique, atteste de la présence de l’Islam de longue date dans la région d’origine du masque. Les Diola, bien qu’ils ne forment pas un groupe culturel homogène, ont tous pour institution majeure le bukut, qui permet l’accession pour les jeunes hommes du village au statut d’adulte. Le bukut comprend des rites et cérémonies publiques durant lesquels les masques sont présents. Ce sont des individus coiffés d’un cimier pourvu de cornes (usikoi) qui viennent chercher les futurs initiés pour les soustraire provisoirement à la vie communautaire. Et ce sont des masques différents (ejumba) qui annoncent le retour des jeunes, dotés de leur nouveau statut d’homme, au sein du village. Les cornes qui figurent sur les masques renvoient au monde animal, sauvage, à la vitalité, la puissance physique, sexuelle, est canalisée par l’initiation. Les cornes d’antilopes évoquent les secrets de la chasse appris au cours de l’initiation ; les cornes de bovinés font allusion aux sacrifices de bétail qui ont lieu à l’occasion de la fête qui marque la fin de l’initiation : la viande, et le riz, sont alors partagés avec tous les invités, ce qui exprime le renforcement des liens entre les générations, y compris avec les ancêtres, et assure la redistribution de richesses – dont l’accumulation égoïste serait indigne d’un homme.Le masque conservé au musée du quai Branly Jacques Chirac est connu sous le nom de « masque Sérent ». Plus d’une quarantaine d’exemplaires de masques ejumba sont connus et la majorité d’entre eux comporte des yeux tubulaires et une ligne verticale de frange de fibres marque la face de l’objet sur toute la hauteur. Ces éléments ne caractérisent pas du tout le « masque Sérent ». Ce dernier appartient de fait à la catégorie de masque ejumba de type kebul, déjà utilisé dans la région à la fin du 17e siècle .Un masque à cornes, élément constitutif de « l’habillement des circoncis », est illustré dans la «Relation d’un voyage fait en 1695, 1696 et 1697 aux Côtes d’Afrique », publiée par François Froger à Paris, en 1698.La forme relativement simple de ce masque ferait oublier qu’il s’agit d’une pièce typologiquement rare, que son histoire est extraordinaire, son rôle symbolique complexe et qu’il s’agit du plus vieux masque africain conservé dans le monde.Longtemps identifié comme un « masque de chasse de la Louisiane », il figurait dans la collection de Charles Philippe de Fayolle, commis auprès du bureau des Colonies d’Amérique qui constitua son cabinet de curiosité à partir de 1756. Trente ans plus tard, les 15.000 pièces rassemblées par Fayolle furent vendues au Marquis de Sérent. Après la Révolution, elles intégrèrent un petit muséum d’histoire naturelle créé au château de Versailles, puis furent transférées à la bibliothèque de Versailles. Inventaires et catalogues mentionnent bien un « masque de chasse à cornes de Louisiane » et c’est sous cette appellation erronée qu’il fut déposé au musée de l’Homme en 1934.