Cyril Zannettacci
Le 28 janv. 2012

Universal Tonality

Jazz Bleu Indigo

Après le succès de la première saison, BLEU INDIGO, jazz au musée se poursuit ce trimestre sous le signe des hybridations entre jazz et musiques du monde, avec des rencontres inédites entre musiciens, la présentation d’artistes de jazz qui ont depuis longtemps travaillé sur les musiques extra-européennes, et les résonances africaines et asiatiques d’une New World Music.

à propos du concert


Un concert du Festival Sons d'hiver

William Parker est un musicien comme les autres hommes – il y tient – dont le destin se confond avec l’histoire contemporaine de la musique créative dans le Lower East Side, à New York, aux États-Unis, en Occident et ailleurs. Contrebassiste, mais aussi joueur de trompette, de shakuhachi, de zintir, de guembri, de kora, de balafon, de dumbek, de gralle… soliste et souleveur d’orchestre, conducteur-clé et accompagnateur-clé, improvisateur et compositeur polymorphe, inspiré conteur et créateur de jeux, poète et activiste patenté, cet homme comme les autres est avant tout un rassembleur d’esprits et d’énergies, faisant inlassablement le lien entre les générations et les êtres, dans ses groupes, ses projets, son quotidien, redistribuant des forces accumulées depuis des années et des siècles dans la musique qu’il libère et la philosophie qu’il délivre. On ne peut lui comparer, à tous ces titres, qu’un seul autre grand contrebassiste de « l’histoire », à la personnalité aussi généreusement démesurée que la sienne : Charles Mingus.

Universal Tonality (ni plus, ni moins, mais l’heure n’est peut-être plus aux hésitations et aux atermoiements) est un orchestre « d’un autre genre », « d’une autre dimension », que William Parker a réuni pour interpréter une suite inédite, « How The World Changed It Self », fidèle à son englobante vision : « Je l’appelle la « Black Mystery Music », car ce sont les Noirs qui ont créé cette musique, bien que nous ne sachions pas comment au juste. Comment Monk est-il Monk ? C’est un mystère, c’est l’inconnue de l’équation, le facteur X, ce que l’on ne parvient jamais à déchiffrer. Et c’est aussi valable pour toutes les autres musiques : il y a la « Red Mystery Music », l’« European Mystery Music », la « Folk Mystery Music »... Cela n’a rien à voir avec la technique, cela n’a rien à voir avec le style. On peut incorporer n’importe quel élément dans n’importe quelle musique : un blues, un rythme punk, n’importe quoi... Ce qui compte, c’est la manière avec laquelle on s’y prend, c’est comment l’on transforme les choses. » Car William Parker ne se soucie que modérément de « repousser les limites », pas plus qu’il ne veut éprouver de limitations : il les reconnaît pour mieux les franchir, il les prend pour ce qu’elles sont ou devraient toujours être, pour des multiplicateurs de possibilités. Se concentrant autant sur la contrebasse que sur le guembri ou le doussou n’goni, la harpe-luth dont se servent certains chasseurs du Mali, Parker remplace ici la conventionnelle diva de jazz par une chanteuse venue d’Inde du Nord, Sangeeta Bandyopadhyay, et le conventionnel crooner de jazz par un chanteur venu du Sénégal, Mola Sylla. Boucles de voix venues de loin, allant chercher loin. Parallèlement, son compère Bill Cole et lui ont recours à des instruments à anche double, du type du hojok coréen ou de la bombarde bretonne, pour épauler le perçant saxophone alto de Rob Brown et l’abyssal saxophone basse de Klaas Hekman – tous bardés des rythmes tournoyants prodigués par Hamid Drake à la batterie et Cooper-Moore sur mille surfaces résonantes, et même éventuellement sur les 88 touches ou tambours d’un piano.

Au-delà des couleurs vocales et instrumentales, des miroirs réfléchissants que fait jouer ce septette kaléidoscopique, à la fois assemblée et assemblage, rassemblement d’esprits et d’énergies, c’est dans l’usage magnétisant qu’en fait William Parker que résident les vertus utopiques d’Universal Tonality. La musique de transe d’un monde en mutation.

  • DISTRIBUTION

    • Mola Sylla : Chant Mbira, Ngoni
    • Sangeeta Bandyopadhyay : Chant
    • Bill Cole : Anches Doubles, Flûte
    • Rob Brown : Saxophone Alto
    • Klaas Hekman :Saxophone Basse
    • Cooper-Moore : Percussions, Instruments Home-Made, Piano
    • William Parker : Contrebasse
    • Hamid Drake : Batterie 
  • Durée :  01:30
  • Lieu :   Théâtre Claude Lévi-Strauss
  • Dates :
    Le samedi 28 janvier 2012 à partir de 18:00
    Chaque concert sera suivi d'un débat entre les musiciens et le public.
  • Accessibilité :
    • Handicap auditif bim (T)
    • Handicap moteur
  • Public :   Handicap auditif (Boucle à induction magnétique), Handicap moteur, Tous publics
  • Categorie : Concerts
  • Dans le cadre de :   Jazz Bleu Indigo 2011-2012
Universal tonality-William Parker © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo
Universal tonality : spectacle enregistré au Théâtre Claude Lévi-Strauss le 28 janvier 2012
Cycle Jazz Bleu indigo (28 janvier 2012, Théâtre Claude Lévi-Strauss) ; Dossier d'archive du spectacle conservé au service des Archives et de la Documentation des collections du Musée du quai Branly.